Avis de tempête sur la Supply Chain Internationale

Cette année, j’ai repris des études en formation continue : le Master 2 Supply Chain Internationale de l’Université Paris-Dauphine.

Après chaque semaine de cours, je vous partage mes réflexions.


MASTER 2 SUPPLY CHAIN INTERNATIONALE - SEMAINE TROIS

Au fur et à mesure des cours et des échanges avec les autres étudiants, je découvre à quel point la Supply Chain est à la fois une discipline d’anticipation et d’agilité.

Pandémie, perturbation du commerce mondial, pénurie des ressources, c’est au moment où la Supply Chain commence à gagner sa place de partenaire stratégique qu’elle est confrontée aux plus grands défis de sa courte histoire.


Réflexion 1 : Complexité et résilience

Grâce au cours de Droit des Transport, j’ai découvert cette semaine l’incroyable complexité du marché des conteneurs maritimes. Les armateurs et les commissionnaires de transport se livrent une guerre sans merci pour garder l’accès aux clients finaux.

Chacun fait preuve d’une ingéniosité sans limite pour répondre aux attentes de ses clients. Et cela, dans tous les domaines : Revenue Management, Alliance, Contrats. Le résultat est tellement sophistiqué qu’il faut être un expert pour le comprendre en détail.

Le contrat est un outil extraordinaire pour donner corps à cette imagination sans limite. Mais à quel prix ? Avec l’imbrication des contrats de ventes, d’assurances et de transport et la multiplication des parties prenantes, que se passe-t-il quand un grain de sable vient gripper la belle mécanique ?

La pandémie de COVID 19 est pour tout le monde un crash test grandeur nature. Le prix du conteneur Chine - Europe est passé de 500$ à plus de 17000$. Cet indicateur est révélateur de la fragilité du système en cas d’évènement imprévisible.

Aujourd’hui, l’heure est à la réaction, à l’agilité pour trouver des solutions tout de suite. Mais demain ? Comment repenser le système ? Impossible de ne pas faire le lien avec le concept « d’anti-fragilité » développé par Nassim Nicholas Taleb.


Réflexion 2 : Le concept d’entreprise étendue et le partage du gâteau

Le cours de Schéma Directeur Logistique a été pour moi l’occasion de poursuivre cette réflexion sur les limites du modèle de l’entreprise collaborative ou entreprise étendue.

La Supply Chain a pour objectif de satisfaire le client en recherchant les meilleures solutions. Une idée forte est de raisonner global. Accepter de perdre à un endroit de la chaîne si au global on gagne en optimisation.

Encore faut-il pouvoir rassembler les forces en présence autour de la même table. Si le périmètre dépasse celui de l’entreprise ou du groupe, il faut alors recourir au droit et aux contrats.

Alliance entre clients et fournisseurs ou entre concurrents, la complexité s'accroît de manière exponentielle et le système, dans son ensemble, se fragilise. Souvent ces alliances « contre intuitive » fonctionnent le temps de leur mise en place, voire tant que chaque partie prenante y gagne. Mais elle peine à perdurer après les premières réelles difficultés.

Comme la vie est bien faite, je suis tombé sur cette étude de Semantic Scholar : « Rente relationnelle et sous performance des firmes pivots dans la chaîne de valeur aéronautique ». Elle démontre que la constitution au sein de la Supply Chain aéronautique de firmes pivots n’a pas permis à ces dernières de surperformer au contraire.


Réflexion 3 : Pénurie des ressources et coûts de transport

Il n’y a pas de commerce possible sans transport des marchandises. La maîtrise du transport et de ses coûts est une composante essentielle de la Supply Chain. Jusqu’à maintenant, la faiblesse des coûts de transports nous permettait d’axer nos efforts sur l’optimisation des réseaux logistiques. Avec la pénurie des ressources non renouvelables comme le pétrole, l’augmentation des coûts de transport est inéluctable. Nous voilà prévenus.

Non content de devoir gérer la reprise chaotique après la pandémie COVID 19, la Supply Chain va devoir s’atteler sans attendre à un défi autrement plus difficile : repenser ses schémas directeurs dans un contexte de coûts de transports de plus en plus élevés.

Si vous n’êtes pas encore convaincu, je vous encourage à lire le très bon (et très long !) article de Jean-Marc Jancovici « L’économie peut-elle décroître ? ».  Qui dit pénurie de ressources dit choix. Le transport fait partie des domaines où il existe des alternatives. La Supply Chain va devoir anticiper si elle ne veut pas se voir imposer des décisions aux conséquences douloureuses. Le compte à rebours a commencé. L’horloge tourne.


Pour paraphraser mes professeurs : J’ai choisi la Supply Chain et j’ai bien fait.
Ça va être passionnant. Vivement la semaine prochaine !